vendredi 24 mars 2017

Elles vivent dans slums de Bangalore

Elles s'appellent Lilly, Salatha, Ruby, Zeena, Pavithra, Ramai, Yasmeen, Devi... et d'autres encore. Elles ont en commun d'habiter dans les slums de Bangalore, un quartier réputé pour être inhospitalier et dangereux pour quiconque s'y promène sans être accompagné. Une fin d'après-midi, sur les conseils avisés de Brandha, responsable d'un groupe de femmes, nous nous sommes aventurés (Arun, Santa et moi) dans cette partie de la ville où nous attendaient Lilly, Salatha et Ruby, trois femmes qui, pour sortir de la spirale de la violence, ont décidé de parier sur l'entraide et sur l'éducation des enfants.


Dans le petit abri aux murs noircis par la misère où elle a accepté de nous parler avant le retour de son mari, Lilly témoigne face à la caméra: "Je fais des ménages pour nourrir mes 4 enfants car mon mari est totalement absent. Je dois aussi emprunter de l'argent pour payer leurs études parce que je veux qu'ils aient une vie meilleure. Les travailleurs sociaux m'aident un peu mais mon mari ne fait absolument rien. Ma seule obsession, c'est d'offrir une bonne éducation à mes enfants et même si je dois travailler dur, ce qui me rend heureuse c'est de voir que mes enfants réussissent bien à l'école, qu'ils obtiennent de bons résultats. L'ainée vient de terminer le cycle secondaire, la deuxième est au niveau 10, la troisième est au niveau 6 et la petite dernière est au niveau 5.... Mon mari est alcoolique et ses intestins sont broyés par l'alcool... Beaucoup d'autres femmes ici partagent les mêmes difficultés car les maris ne travaillent pas, ils sont prisonniers de l'alcool et tombent malades. Et même si vous devez payer qu'une roupie pour avoir de l'eau, qui va payer cette roupie si votre mari ne travaille pas? Ce sont donc les femmes qui travaillent pour nourrir la famille".

Après cet entretien, Lilly et Salatha marchent en éclaireurs d'un pas rapide dans ce corridor de ruelles où les femmes étendent le linge sur des fils tendus entre les immeubles, où les marchands ambulants traînent des chariots brinquebalants, où les cris et les rires des enfants inquiètent tout autant qu'ils rassurent... sous le regard des hommes surpris par la caméra qui se fait pourtant la plus discrète possible. Lilly et Salatha, qui habitent cet endroit, expliquent aux personnes trop curieuses que nous ne sommes pas là pour parler de la misère qui sévit dans ce quartier mais pour mettre en avant le travail d'éducation auprès des jeunes. Salatha et Ruby témoignent à leur tour de leur combat de femmes confrontées à la violence du quotidien. Elles nous disent aussi qu'elles ne sont pas très rassurées car la violence peut surgir à chaque coin de rue et les vols à l'arraché sont fréquents dans cette jungle où la loi du plus fort fait force de loi. Alors nous ne nous attardons pas davantage et nous nous donnons rendez-vous pour partager le repas du lendemain avec vingt autres femmes qui habitent dans les slums. Un repas que j'aurais à coeur de leur offrir comme simple remerciement.